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lundi, février 16, 2004

(The Breeders/Cannonball)

Assailli de toutes parts par des questions, je me retranche dans la citadelle de ma reflexion. Ma depressive me demande si je la supporte encore, après toutes ces années "sans progrès". Elle me dit de partir si je ne peux plus supporter ce qui m'est imposé. De ne pas me pourrir la vie à cause de sa maladie.

Pas la peine de faire un dessin sur ce qu'est l'amour et toute les conneries qui vont avec. J'ai pas envie de partir. Mais il est indubitable que parfois, le fardeau pèse bien lourd. Que parfois je pense à tout ce que je ne peux pas faire, à tout ce que j'ai déjà dû me résoudre à ne pas faire à tout ce que je dois m'attendre à refuser(Placebo/Ask for answers). Et j'ai l'impression de passer à côté de tellement de choses. De ma vie, peut être.

Ca c'est idiot, on ne passe pas à côté de sa vie, on la vit, forcément. Celui qui croit passer à côté de sa vie est un rêveur, un vélléitaire, voire une loque. Je suis heureux ; je ne peux le nier. J'ai la chance de voir la beauté du monde (ou la malchance d'être aveugle à sa laideur, c'est vous qui voyez), et je puise ma force dans ce sentiment de félicité. Et ma force me fuit quand je me disperse, quand je me désintègre pour intègrer le monde et que je ne le vois plus. Car pour le voir il faut s'en extraire, forcément. Je suis heureux avec ma depressive. Pas toujours bien sûr. Il m'arrive d'être en colère, d'être amer, d'être triste, d'être vide... (Benabar/Le Lapin)

Mais... Mais si un jour, j'en ai assez ? Si, dans le moule de la quarantaine, marié, père, et tutti quanti, je craque ? Invraisemblable. Sans prendre en compte les sentiments, j'aurai trop de scrupules pour ce genre de chose. Ce qui amène à la question de la morale qui pourrit la vie et empêche d'être heureux. J'ai enfin réussi à lire le tome 2 du Quartier Lointain, de Jirô Taniguchi (on commence à retrouver toujours un peu les mêmes thèmes chez lui, ou je me trompe ?). Alors forcément tout ça, ça résonne(Cinematic Orchestra/Blue Birds), ça se retourne, ça frappe à la porte de la conscience. La lecture vitaliste est une lecture partielle de Nietzsche. Nietzsche s'en prend à une morale, pas à la morale, à la Vérité, pas aux vérités. Il y a une morale dans la vie même. Ne pas céder à son égoïsme ne signifie pas étouffer sa propre puissance.

Je sais, à cause de mes scrupules, que je ne lâcherai rien avant que mes enfants ne puissent me comprendre. Je compte pas bousiller leur psychisme. Oui, si un jour, j'en arrive à tout lâcher, je serais passé à côté de quelque chose. J'aurais raté quelque chose. Et je sais quoi. J'aurais raté une vie égoïste. Je suis en train de passer à côté d'une vie égoïste. Tant mieux. Alors quoi ? Je souffre pour me donner bonne conscience, pour me dire que je ne suis pas égoiste ? (Sergent Garcia/El camino de la vida) Non, je ne crois pas. Pour la simple raison que pour l'instant, je ne souffre pas. Le bonheur partagé avec elle surpasse de beaucoup mes quelques instants de faiblesse. Et les siens. Ca doit être Bloch qui parlait du principe espérance auquel Jonas fait référence avec le principe responsabilité. L'espoir que la souffrance a une fin.

J'ai connu la souffrance, les cauchemars, la haine, la rage, la peur, le vide, la désespérance. Elle a su y mettre fin. Pourquoi ne pourrais-je à mon tour lui offrir la paix de l'âme ? (Yoko Kanno/Walk in the Rain... décidemment c'est ambiance joyeuse) Alors quoi ? Je reste par gratitude ? Par sentiment d'avoir une dette à régler ? Non plus. Je reste parce que je suis bien. Et que je me sens d'autant mieux que quelqu'un grâce à qui je me sens bien se sente bien grâce à moi (oulah chelou cette phrase). Je n'essaie ici de persuader personne. Ni moi, ni elle, ni vous.

J'ai parfois peur que sa guérison passe par mon abandon. Elle me dit que non. Le doute persiste. La confiance l'emporte (Massive Attack/Angel).



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